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MANCHESTER OPEN : CAMILLE SERME S'INCLINE EN FINALE

Événements 23/09/2020

Le premier tournoi post-Covid du circuit international s'est achevé hier à Manchester : après un très beau parcours, Camille Serme a été battue en finale par Nour El Tayeb.

Même si seulement trois Français avaient franchi le premier tour, le contingent Tricolore a montré de belles choses face à une opposition très relevée. Décryptage en compagnie des entraîneurs nationaux, qui ont suivi la compétition à distance ...

Article de Jérôme Elhaïk

Photos PSA World Tour / Nathan Clarke

CAMILLE SERME AU RENDEZ-VOUS

Camille Serme n'a pas remporté son seizième titre sur le circuit international à Manchester (Silver, 85 000 $ hommes et femmes), mais elle a raison d'être « fière de son parcours. » Opposée à Nour El Tayeb (n°4 mondiale) hier en finale, la Française (n°3) a réalisé une excellente entame avant de ressentir la fatigue, conséquence des efforts fournis lors des matches précédents. « Camille me l'a confié juste après, elle était carbo (sic), » confie son entraîneur Philippe Signoret. « Personnellement, je l'avais senti dès la fin du premier jeu car elle avait perdu sa longueur de balle. Elle a réussi à bien gérer son avance, mais je me suis dit que ça allait être compliqué par la suite. Nour a vu que Camille était fatiguée, et ça l'a boostée. C'est une joueuse à laquelle il ne faut pas laisser le temps de s'organiser, encore faut-il en avoir les moyens physiques. De plus, elle défend extrêmement bien, et on a l'impression que la balle revient en permanence. » Malgré cette défaite (3 jeux à 1), la Cristolienne repart d'Angleterre avec des ondes positives. En point d'orgue, sa superbe victoire en demi-finale face à la valeur montante du squash féminin international, Hania El Hammamy (n°6). « Je trouve que c'est son meilleur match contre elle, » indique Philippe Signoret. « Pendant trois jeux c'était quasi-parfait, et même sur sa balle de match à 10-9 elle ne joue pas si mal le coup. Alors oui, on peut se dire qu'elle aurait eu davantage de fraîcheur en finale si elle avait gagné 3-0, et si elle s'était simplifiée la tâche lors des tours précédents. Mais ce serait ignorer le niveau de ses adversaires, et je trouve par exemple qu'une Nele Gilis a beaucoup progressé : je ne suis pas sûr que Nour El Tayeb l'aurait battue facilement. Objectivement, le parcours de Camille a été plus difficile mais ça fait partie du jeu. Maintenant, place à la récupération, avant son départ pour le Caire en fin de semaine. » La Française se voit proposer un menu en forme de retrouvailles à l'occasion des finales du World Tour 2019-2020 : Hania El Hammamy mardi, et Nour El Tayeb mercredi ... Pour rejoindre le dernier carré, elle devra terminer dans les deux premières d'une poule B où l'on retrouve aussi Amanda Sobhy (qu'elle affronte jeudi). Camille restera ensuite en Égypte pour y disputer le CIB Egyptian Open (10-17 octobre), mais sans son entraîneur. « On a le droit d'être en tribune mais pas de côtoyer les joueurs ni pendant ni entre les matches, donc ça ne sert à rien d'y aller, » explique ce dernier. « Pendant Manchester, on a essayé d'appliquer la même méthode que lors du ToC à New York : débrief à chaud après le match, puis on laissait un peu de temps passer avant de préparer le prochain à la vidéo. Enfin, je lui envoyais un mot de synthèse. La plupart du temps, elle a bien appliqué la stratégie et si j'avais été sur place pour la coacher entre les jeux, je n'aurais pas eu grand chose à dire si ce n'est de la conforter dans ses choix .. Sauf en finale, j'avais les boules (sic) de ne pas être là pour l'aider. Mais avec la fatigue, je ne sais pas si ça aurait changé le cours des choses ... »

« Je trouve que Camille a fait son meilleur match contre Hania. » Philippe Signoret

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Camille Serme a réalisé un beau parcours à Manchester, avec notamment une superbe victoire en demi-finale face à Hania El Hammamy 

CAMILLE SERME : « Je ne pense pas que j'aurais pu faire beaucoup plus avec mes moyens du jour, je n'avais plus beaucoup de carburant en fin de match. C'est compliqué de jouer contre Nour, qui ramène énormément de balles – dans un style différent d'Hania El Hammamy. J'ai essayé de trouver des solutions, mais je ne savais plus trop quoi faire à la fin et j'ai fait beaucoup de fautes. Bravo à elle, elle mérite sa victoire. Je suis bien évidemment déçue mais avec quelques jours de recul je pense que je serai satisfaite d'avoir atteint la finale. Avant le match, je me sentais bien. Le premier jeu a été presque trop facile, mais ensuite elle a commencé à rentrer dans la partie. Elle a durci les échanges et c'est à ce moment que j'ai senti que mes jambes étaient lourdes. J'ai certainement payé le fait d'avoir passé plus de temps sur le court qu'elle lors des tours précédents. J'ai hâte de participer aux finales du World Tour. Mais ça va également me faire du bien de passer quelques jours à la maison avec mon équipe et ma famille, et de récupérer physiquement et mentalement. »

Outre Camille, une autre Française avait franchi le premier tour à Manchester : opposée à Hana Ramadan (n°53 mondiale), « une joueuse qui lui avait causé des soucis dans le passé, » dixit Philippe Signoret, Coline Aumard (n°20) avait fait preuve d'une belle maîtrise pour sortir la jeune Égyptienne. « Elle l'a dominée côté revers, » ajoute le responsable du pôle France de Créteil. « Coline était déjà performante dans ce domaine, mais je trouve qu'elle s'est encore améliorée. » En 1/8ème de finale, elle n'est pas parvenue à rééditer sa performance du Black Ball Open, où elle avait battue Salma Hany. Auparavant, la n°11 mondiale avait écarté une autre Française, Mélissa Alves (n°35). « Contrairement à Coline, elle a plutôt bien réussi à la cadrer au fond du court, c'est dommage qu'elle n'ait pas tenu sa tactique, » analyse Philippe Signoret. « Contre une joueuse comme Salma, il faut attaquer avant elle sinon ça devient très compliqué. Pour gagner ce genre de match, il faut savoir saisir sa chance et aller au bout des choses. J'en parle souvent avec Camille : pour battre les Égyptiennes, il faut impérativement parvenir à mettre un grain de sable dans la machine, sinon elles jouent toutes à un niveau incroyable. » Enfin, Énora Villard (n°50) avait une tâche ardue face à Hania El Hammamy et s'est logiquement inclinée en 3 jeux. « Mais Énora a bien géré le contexte (c'était la première fois qu'elle jouait devant les caméras de SquashTV) et fait un excellent premier jeu. Comme Hania a vu qu'il y avait du répondant en face, elle a haussé son niveau. Le seul reproche que je lui ferais, c'est de ne pas avoir su réagir et d'avoir un peu perdu en combativité. Mais pour Énora, le fait de participer régulièrement à ce genre de tournoi est évidemment une très bonne chose. » Positif, c'est le mot qu'il utilise pour qualifier le bilan de cette compétition de reprise (« comme je l'espérais, les filles étaient prêtes physiquement grâce au travail effectué pendant le confinement et après, »), mais qu'il souhaite aussi absolument éviter concernant leurs tests Covid. « Au vu du contexte actuel, on va resserrer notre protocole pour protéger les joueuses au maximum. C'est rassurant de voir que la PSA se démène pour trouver des solutions, en tous les cas pour les gros tournois. Les deux prochains auront lieu au Caire, donc on peut dire merci l'Égypte ... »

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L'entraîneur national Philippe Signoret retire des enseignements positifs des prestations des autres Françaises (Coline Aumard, Énora Villard et Mélissa Alves) 

PEU DE VICTOIRES, MAIS DES PROMESSES

Chez les hommes, le bilan brut (sur les six Français en lice, un seul – Grégoire Marche – a franchi le premier tour) doit être mis en perspective. « Si l'on fait la comparaison avec l'open de France, également un tournoi Silver qui avait eu lieu la saison dernière à la même époque, le niveau était beaucoup plus fort cette fois-ci, » souligne Renan Lavigne. En effet, non seulement les 5 meilleurs joueurs du monde étaient présents à Manchester, mais aussi 10 membres du top 12 (contre seulement trois à Nantes). « La donne a changé, et il faut se préparer à ça, » ajoute l'entraîneur national. « Entre le choix de tournois moins important et le nouveau système de calcul pour le classement, les tableaux seront plus relevés. Un top 30 qui participe à un 12 000 $ (NDLR : Raphael Kandra à Prague, juste avant Manchester), on ne voyait pas ça avant. » Par conséquent, la marche était très haute d'entrée pour les Bleus, quatre d'entre eux étant opposés à des joueurs du top 8. « Pour passer ce tour, il fallait donc faire une très grosse performance, » indique Renan Lavigne. « Ça n'a pas été le cas, mais j'ai vu des choses intéressantes après six mois sans compétition. Ils étaient prêts physiquement, tout en ayant un manque de repères par rapport aux adversaires - et ça a peut-être eu un impact sur la prestation d'un Mathieu Castagnet par exemple. Il m'a également confié que ça n'avait pas été facile de passer 48 heures seul dans sa chambre avant son match. Il n'a pas joué à son véritable niveau et il faudra débriefer de manière approfondie pour comprendre pourquoi (NDLR : cet entretien a été réalisé en début de semaine). » Lorsqu'on lui demande comment il a géré le fait de vivre la compétition à distance, l'entraîneur national ne cache pas sa frustration. « Ce n'est pas comme ça que je conçois mon métier, » confie-t-il. « Non seulement, on n'a aucun levier pour influer sur le cours d'un match, mais lors des débriefs c'est difficile d'apporter une plus-value car lorsqu'on n'est pas sur place on ne peut se fier qu'au ressenti des joueurs. » Comme Philippe Signoret, Renan Lavigne ne se déplacera pas au Caire pour le CIB Egyptian Open. « Comme on ne peut pas voir les joueurs, autant que je reste à Aix-en-Provence pour m'occuper de ceux qui sont sur place, notamment les jeunes. »

« Le niveau était très relevé, mais ça sera comme ça dans tous les tournois. » Renan Lavigne

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Confrontés à une opposition très relevée à Manchester, le contingent masculin Tricolore n'avait qu'un représentant au deuxième tour - Grégoire Marche, en haut à droite - mais certains ont pris rendez-vous pour l'avenir

Quand un Français chasse l'autre ... Juste avant le tournoi, Grégory Gaultier avait été contraint de se retirer du tableau. « Il avait un test PCR négatif de moins de 72 heures, mais alors qu'il était en route pour Manchester il a appris qu'il était cas contact, » explique Renan Lavigne. « Il y avait le risque d'être bloqué dans une chambre pendant dix jours, qu'il n'a pas souhaité prendre. Greg est évidemment frustré, car il aurait aimé se jauger contre des joueurs du top 10 mondial. » Partie remise pour le French General, qui en aura l'occasion en Égypte dans quelques jours. De son côté, Benjamin Aubert (n°53 mondial) a intégré le tableau au dernier moment suite au forfait de Daryl Selby. « Lundi, il entamait une nouvelle semaine d’entraînement au pôle, et mardi matin, il était à Manchester ! » raconte son entraîneur. « Il a joué avec ses atouts, mais Marwan El Shorbagy - qui connaissait ses capacités, l'ayant vu accéder aux demi-finales à Detroit - a eu recours à sa robustesse de joueur du top 10 pour contrecarrer les initiatives prises par Benji. » Opposé à Paul Coll (n°5), Baptiste Masotti (n°35) a réalisé une très belle prestation, s'inclinant en quatre jeux. « Le fait de rentrer dans le tableau alors que ce n'était pas garanti au départ l'a boosté, » souligne Renan Lavigne. « Il a rivalisé pendant deux jeux et demi, et ce n’est pas faire injure au Néo-Zélandais que de dire que Baptiste a été le plus entreprenant sur le court. Il n'avait pas peur de Coll, et est rentré sur le court pour gagner. Néanmoins, il y a encore quelques schémas récurrents dans son jeu, et il faudra analyser tout ça à la vidéo. On sait que Baptiste est l'un des joueurs qui descend le mieux la balle sur le circuit, mais pour s'imposer face à un tel métronome il faut réduire le nombre de fautes. » Autre Français à faire face à un membre du top 5 mondial, Lucas Serme (n°38) a mené la vie dure à Karim Abdel Gawad, avant que l'Égyptien ne prenne le dessus dans le cinquième jeu. « Lucas a été très combatif, » souligne l'entraîneur national. « C'était bien sûr un tirage compliqué, et s'il parvient à reproduire ce niveau de jeu il aura toutes des chances contre des joueurs un peu moins forts (même si l'approche n'est pas la même lorsqu'on affronte un top 5 ou un top 20). » Comme évoqué plus haut, Mathieu Castagnet (n°23) n'a pas montré son vrai visage face à Simon Rösner (n°8). « Après le match, il m'a dit "rien de bon", » " affirme Renan Lavigne. « Mat restait sur une série de gros résultats avant le confinement, mais fort de son immense expérience, il saura analyser tout cela. » Toujours dans l'incertitude quant à son retour à Harvard, Victor Crouin a dominé Declan James (n°22, soit 20 places devant lui) pendant la majeure partie des cinq jeux de la partie, sans pouvoir conclure malgré une balle de match. « J'ai lu le commentaire d'après-match de Victor, qui a tendance à être très exigeant avec lui-même, » affirme Renan Lavigne. « Mais il n'a fait pratiquement que des bons choix, sauf effectivement un ou deux à la fin. Il a joué de manière à la fois agressive et juste, et je trouve qu'il lui a fait très mal. C'est de bon augure pour la suite. » Comme évoqué plus haut, Grégoire Marche (n°16) était le seul Tricolore présent en 1/8ème de finale. Auteur d'une prestation solide pour écarter le dangereux Youssef Soliman (n°31) au premier tour, il avait ensuite rendez-vous avec Ali Farag. Après un début de partie très compliqué, le néo-pensionnaire d'Annecy a joué yeux dans les yeux avec le n°2 mondial, passant tout près de l'emmener dans un cinquième jeu. « Après six mois sans compétition, quel plaisir d'être sur le court et de jouer à ce niveau, » disait-il après le match. « C'est dommage de ne pas avoir pris le quatrième après avoir mené 10-7, mais Ali a mieux joué dans les points importants. Je suis déçu du résultat mais encore plus motivé pour la suite, en espérant que les choses reviennent bientôt à la normale. » 

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