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4ème OPEN INTERNATIONAL DE NANTES : MASOTTI TOUJOURS EN VIE
Événements 08/09/2018Baptiste Masotti a fait chavirer le public Nantais vendredi soir : le Français a sauvé cinq balles de match avant de battre Olli Tuominen et de se qualifier pour les demi-finales.
Il faut avoir un bon sens de l'orientation pour trouver son chemin dans les méandres du théâtre Graslin. Cinq étages et quelques demi-tours plus tard, on a retrouvé Baptiste Masotti sur la table de l'un des kinés du tournoi. À peine le temps de savourer son incroyable victoire face à Olli Tuominen, le Niortais était déjà projeté sur sa demi-finale. Il ne le savait pas encore à ce moment-là, mais ce sera contre Declan James, un joueur associé au meilleur souvenir de sa carrière. Entretien vérité.
Propos recueillis par Jérôme Elhaïk
La victoire avant tout
Plus que son déroulement, c'est avant tout la fin du match entre Baptiste Masotti et Olli Tuominen qui restera dans les mémoires. Auparavant, la bataille avait été intense, mais sans atteindre des sommets en termes de qualité. Le Français admet « ne pas avoir fait le match de sa vie, même si j'ai tout de même eu de bonnes séquences. Notamment dans le troisième jeu, que j'ai pourtant perdu. Par contre, j'estime que lui a vraiment bien joué : parvenir à battre un joueur de ce calibre sans être au top c'est bon signe, ça signifie que mon niveau moyen augmente. Renan (NDLR : Lavigne, son entraîneur) m'avait envoyé un message plus tôt dans la journée pour me rappeler que l'essentiel était de gagner et non pas de bien jouer. L'autre point positif, c'est d'enchaîner une deuxième grosse victoire après celle contre Campbell Grayson avant-hier. C'est ma première finale dans un tournoi de cette catégorie, c'est donc un cap important. »
Pas forcément un grand match, mais une grande victoire pour Baptiste Masotti face à Olli Tuominen (Crédit photo : Lauranne Rochais)
Quand l'impossible devient possible
Olli Tuominen n'a pas plus de vingt ans d'expérience sur le circuit pour rien. Après avoir laissé filer le quatrième jeu, le Finlandais s'est remobilisé et a réussi un début de cinquième parfait, jusqu'à 10-5 … C'est à ce moment là que la machine s'est déréglée, et que Masotti a été chercher l'aide du public (les deux facteurs étant sans doute liés). « À quoi on pense à 10-5 ? On y croit sans y croire, j'ai juste essayé de jouer point par point et le fait de voir qu'il n'était pas hyper serein m'a boosté. Quand j'obtiens le stroke à 10-10, je sais que j'ai gagné … Je pense qu'il va mal dormir ce soir ! Moi aussi, mais pour des raisons différentes. Avec la tension, c'est toujours délicat de trouver le sommeil après ce genre de matches. »
Apprivoiser le contexte
Pour la première fois de sa carrière, Baptiste Masotti a disputé un match devant les caméras de Squash TV. « En tant que joueur on y pense un petit peu, tu te demandes ce que les commentateurs vont dire sur toi car ils sont assez chambreurs (rires). Concernant le lieu, c'est tout simplement magique de jouer ici. J'ai la chance de disputer un tournoi du circuit dans ma ville (NDLR : l'open international de Niort), mais là on joue dans un opéra quand même, c'est encore un cran au-dessus ! Je voulais au moins disputer un match ici, mais deux je ne l'aurais pas imaginé. En plus, mon père a fait le déplacement, et j'ai une pensée pour ma mère et ma sœur qui ont regardé le match. Le fait de les voir ou de penser à eux pendant un match, ça me galvanise, c'est ce qui me donne la force de revenir quand je suis mené mené 10-5 … Niort est à moins de deux heures de route, je pense qu'il y a une belle délégation qui va arriver demain ! »
Le Français a remercié le public du théâtre Graslin, qui a mis le feu en fin de match (Crédit photo : Mikphotos.fr)
Masotti rime avec énergie
Même s'il n'est encore qu'au début de sa carrière, on sait déjà que Baptiste Masotti fait partie de ceux qui aiment les grandes occasions, et la pression qui va avec. Il y a quelques semaines, c'est lui qui avait eu droit au match décisif lors de la finale du championnat d'Europe par équipe face à l'Angleterre. En remportant un jeu face à un certain Declan James (NDLR : qui, il ne le savait pas encore lors de cet entretien, sera son adversaire ce soir en demi-finale), il avait envoyé les Bleus sur la plus haute marche du podium. Mais le Niortais avoue « se surprendre lui-même à faire ce genre de choses. Revenir de 5-10 dans un cinquième jeu contre un joueur comme Olli, qui jouait déjà sur le circuit lorsque j'avais 3 ans, ce n'est pas facile ! Je suis quelqu'un qui a beaucoup d'énergie, et je sais que parfois j'en dépense trop pendant un match. Mais je fais des progrès, aujourd'hui j'ai essayé de rester concentré sur ce qui se passait sur le court plutôt que de regarder derrière la vitre (sic). Depuis quelques temps, je travaille le mental avec Yann Menegaux. J'ai aussi changé quelques trucs dans ma vie, et je remercie ma copine qui m'aide à me cadrer. Mais je sais aussi que je ne serai jamais calme sur un court, et c'est aussi cette folie qui me permet de renverser une situation comme celle-là. »
Comme à son habitude, Baptiste Masotti a exprimé ses émotions sur le court hier ! (Crédit photo : Mikphotos.fr)
Ne pas s'arrêter là
Les joueurs n'aiment généralement pas jouer tard le soir, mais Renan Lavigne n'était pas mécontent d'apprendre que son protégé jouerait sa demi-finale samedi à 21h45. Que fait un joueur de squash professionnel entre deux matches ? « La première chose c'est de passer entre les mains du kiné, comme je suis en train de le faire. On n'en a pas à disposition sur tous les tournois, c'est un luxe. Passer le temps entre les matches n'est pas toujours facile, surtout pour quelqu'un comme moi qui a envie d'enchaîner. J'ai la chance d'avoir quelques amis qui habitent Nantes, et c'est aussi un avantage d'avoir Renan, ainsi que mon père, à mes mes côtés cette semaine. Concernant le match de demain, j'espère que je jouerai contre Grégoire, comme ça on aura un Français en finale ! » Comme évoqué plus haut, Masotti sera en réalité opposé à Declan James, impressionnant hier soir contre le triple tenant du titre.
Baptiste et Declan James - ici lors de leur seule confrontation en finale du championnat d'Europe par équipe - vont se retrouver ce soir en demi-finale (Crédit photo : squashPage.net)
Pour Masotti, l'avenir est Bleu
Membre des sélections nationales depuis l'âge de 13 ans, le Niortais monte au créneau lorsqu'il s'agit de défendre le squash Français. « Il y a des mauvaises langues qui critiquent nos résultats, notamment au championnat d'Europe la semaine dernière. Mais la vérité c'est qu'on a super groupe, et qu'on se tire tous mutuellement vers le haut. Quand l'un d'entre nous a un bon résultat, ça booste les autres pour essayer d'en faire autant. On a beaucoup de très bons jeunes, et je suis optimiste pour l'avenir de l'équipe de France. En ce qui me concerne, je suis conscient que j'ai le potentiel pour faire une belle carrière, mais je sais aussi qu'il faut être patient et que ça prend du temps. C'est impossible d'y arriver sans travailler, et même dans ce cas il n'y a aucune garantie. Le circuit est tellement dense à l'heure actuelle, entre le 30ème et le 80ème mondial tout le monde peut battre tout le monde. Et si demain je joue le 120ème, je n'ai aucune assurance de gagner si je ne joue pas à mon meilleur niveau. »
La réaction de Renan Lavigne (entraîneur de l'équipe de France masculine)
Le camp Masotti était aux anges après ce match et cette fin inattendue, notamment son entraîneur au pôle France d'Aix-en-Provence, Renan Lavigne. Réaction.
« Même à 5-10, j'étais sûr que Baptiste pouvait le faire car il avait la bonne attitude et était concentré sur le jeu. Quand Olli fait la faute sur son double mur inversé, un coup que je l'ai vu faire des centaines de fois, je me suis dit que c'était bon signe. Il a perdu patience dans le money time : ça prouve encore une fois que dans le sport tout est possible car les émotions sont un facteur essentiel, même pour une joueur comme lui qui a une très grande expérience. Plusieurs joueurs du pôle avaient réalisé de très belles perfs ces derniers temps, mais ils avaient quasiment systématiquement perdu au tour suivant. Cette fois-ci, Baptiste est parvenu à capitaliser sur la confiance acquise après sa victoire contre Grayson mercredi. Je trouve qu'aujourd'hui (hier), il a fait de bonnes choses en début de match, avec notamment une bonne longueur en passant du coup droit au revers. C'est vrai aussi qu'Olli l'a énormément fait travailler côté revers, mais je pense que Baptiste est parvenu à prendre le dessus en amenant le jeu à l'avant du court. J'estime d'ailleurs que c'est un aspect sur lequel il devra encore davantage insister à l'avenir s'il souhaite passer un cap supplémentaire. Il joue à 21h45 demain ? Tant mieux, ça va laisser plus de temps pour la récupération. Mon rôle est de l'aider à rester concentré et ne pas se disperser, surtout pour un joueur comme lui qui a beaucoup d'énergie et aurait envie de rejouer tout de suite.
Renan Lavigne (Crédit photo : Mikphotos.fr)
En tant qu'entraîneur, ce genre de match et de dénouement provoque bien sûr une grande satisfaction. C'est jouissif (sic) ! Ça valide tout le travail effectué à l'entraînement, surtout lorsqu'un bon résultat se produit dès le début de saison. Mon rôle est important, mais l'implication de l'entraîneur est proportionnelle à celle du joueur : c'est lui qui donne le ton. Par exemple, quand je dis à Sébastien Bonmalais « rendez-vous demain pour une séance physique à 10h » il me répond qu'il sera là à 9 heures … Avec ce genre de joueurs, on peut partir à la guerre … »