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LE SQUASH AUTREMENT (N°8) : LES MYSTÈRES DES PYRAMIDES ...

Événements 29/10/2019

Notre rendez-vous mensuel Le Squash autrement observe la discipline sous un angle plus large que celui de l'actualité sportive instantanée.

Cette semaine, Camille Serme va tenter de contrecarrer la suprématie Égyptienne et d'être sacrée championne du monde au pied des pyramides de Giza. Pourquoi le pays des Pharaons domine-t-il autant la discipline à l'heure actuelle ? Pour répondre à cette question, nous avons interrogé les numéros 1 mondiaux masculin et féminin, Ali Farag et Raneem El Welily.

Article de Jérôme Elhaïk

Version anglaise Dr : SQUASH OUTSIDE THE BOX: THE MYSTERIES OF THE PYRAMIDS ... 

PRÉAMBULE

Les jeunes Français ont brillé de milles feux ces derniers jours au CIB Egyptian Open, et ce n'est pas fini pour Baptiste Masotti. De son côté, Camille Serme fait partie des candidates crédibles au titre de championne du monde 2019-2020 qui sera décerné à la fin de la semaine. Pour cela, elle devra peut-être battre trois joueuses du pays hôte en quart, en demi et en finale. L'Égypte est la super puissance qui domine le squash à l'heure actuelle, et la vérité des faits et chiffres est implacable, en attendant que les Bleu(e)s fassent mentir les statistiques dans les prochains jours : ses représentants détiennent les huit titres mondiaux les plus importants (hommes et femmes, individuels et par équipe, senior et junior) et ont remporté 32 des 35 titres majeurs mis en jeu sur le circuit professionnel depuis le début de la saison 2017-2018 ! Pour comprendre les raisons d'une telle suprématie, quoi de mieux que de demander leur avis aux deux numéros 1 mondiaux ? Voici un entretien exclusif avec Ali Farag et Raneem El Welily. 

Le squash autrement #8 Photo 0 Les numéros 1 mondiaux Raneem El Welily et Ali Farag jouent devant les pyramides cette semaine (Crédits photo : CIB Egyptian Squash Open) 

1 - LÀ OÙ TOUT A COMMENCÉ ...

On entend souvent que la victoire d'Ahmed Barada devant les pyramides en 1998 a été le déclic pour le développement du squash en Égypte. Étiez-vous dans les gradins ?

Ali Farag : J'avais six ans à l'époque. Mon père a toujours été un amoureux de squash, il en faisait en loisir, et mon frère jouait déjà. On est allé aux pyramides ensemble, et j'en ai des souvenirs extrêmement précis, en particulier de la foule. On n'y allait pas forcément tous les jours pendant le tournoi : du coup je regardais également les matches à la télé, c'était un évènement très important. Je pense en effet que le tournoi des pyramides a été LE facteur déclencheur pour le squash de haut niveau en Égypte. On voulait tous jouer dans un tel cadre un jour, et devenir le futur Ahmed Barada, puis ensuite Amr Shabana, Karim Darwish ou Ramy Ashour.

"Le tournoi des pyramides a été le facteur déclencheur pour le squash de haut de niveau en Égypte." Ali Farag 

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Dix-huit ans après le succès historique d'Ahmed Barada (en haut), Raneem El Welily (en rouge) avait remporté en 2016 le seul tournoi féminin disputé à ce jour devant les pyramides (Crédits photo : PSA World Tour) 

Raneem El Welily : J'étais également aux pyramides quand Ahmed Barada a gagné ce tournoi. Mais il n'y avait pas que lui : j'ai grandi en regardant de nombreux joueurs Égyptiens là-bas. Ma famille habitait à Alexandrie, et pour mon frère – trois ans plus âgé - et moi c'était un peu comme des vacances. Je faisais la queue pendant des heures et des heures pour avoir les autographes des joueurs, et je me souviens avoir attendu longtemps pour obtenir celui de Peter Nicol, après sa victoire en 1997. Sans aucun doute, Ahmed Barada et toute l'agitation qu'il y avait autour de lui, ainsi que l'ambiance près du court, ce sont des choses qui fascinaient les enfants que nous étions. On rêvait d'être à sa place un jour, de jouer dans un tel cadre et devant autant de monde.

2 - LES JEUNES AVANT TOUT

Lors d'une conférence de presse organisée après la victoire de l'équipe de France féminine au championnat d'Europe, l'un des journalistes présents avait demandé aux joueuses et à leur entraîneur leur explication quant à la domination Égyptienne. Philippe Signoret avait évoqué la priorité donnée aux jeunes dans votre pays, et le fait qu'on voit largement plus de joueurs de 4 ans que de 40 ans sur les courts. Êtes-vous d'accord ?

Ali Farag : Tout à fait, une grande attention est accordée aux jeunes en Égypte. Dans le club où j'ai grandi, il y avait sept courts. Cinq étaient réservés aux équipes – constituées principalement de juniors - et deux seulement pour les autres membres. Aujourd'hui, nous avons Karim Darwish et son académie à Wadi Degla. Il y a cinq sites, ce qui correspond à environ 60 courts et 2 500 enfants. Je vous laisse imaginer à quel point ils sont remplis … Oui, nous donnons la priorité aux jeunes, afin qu'ils puissent passer le plus de temps possible sur le court, et développer leur passion pour ce sport.

"Nous donnons la priorité aux jeunes, afin qu'ils puissent passer le plus de temps possible sur le court et développer leur passion pour le squash." Ali Farag

Raneem El Welily : Je suis également d'accord avec Philippe mais il faut préciser que lorsque j'étais enfant, les gens ne faisaient pas beaucoup de sport en Égypte. Notre mode de vie n'était pas aussi sain qu'aux États-Unis ou en Europe par exemple, mais les choses ont changé ces dernières années. Les salles de fitness sont de plus en populaires, que ce soit pour faire de l'exercice, du cross-fit ou pour essayer différents sports. Cela étant dit, en Égypte le football a toujours prédominé et c'est encore le cas. Si un groupe d'amis veut se retrouver en pratiquant un sport, ils se tournent généralement vers le foot, très peu de gens iront jouer au squash. Donc oui, ce sont les jeunes qui occupent les courts - la plupart d'entre eux étant des compétiteurs – et on y trouve peu d'adultes. Il n'y a quasiment pas de clubs où des amateurs jouent au squash en loisir, comme dans d'autres pays. 

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On retrouve régulièrement des centaines de jeunes sur les tournois junior en Égypte, comme ici lors de l'Ardic Junior Open (Crédit photo : Ardic Junior Open) 

Pensez-vous que vous auriez pu vous tourner vers un autre sport si vous n'aviez pas bénéficié d'un tel accès aux courts ?

Ali Farag : Ça a été un facteur très important dans ma jeunesse. Je me souviens avoir passé beaucoup de temps autour des courts, et même après mes entraînements j'allais taper la balle entre les jeux lorsque les gens faisaient des matches. Effectivement, peut-être que je me serais tourné vers un autre sport si je n'avais pas pu jouer autant.

Raneem El Welily : Je ne sais pas si c'est toujours le cas aujourd'hui, mais quand j'étais jeune la Fédération nous aidait beaucoup, notamment financièrement pour que l'on puisse participer à des tournois juniors. Comme je le disais auparavant, je vivais à Alexandrie et des coaches venaient spécialement du Caire pour nous entraîner. De gros efforts ont été consacrés au développement et à la progression des jeunes joueurs. Dans mon club, il y avait 12 courts et ils étaient quasiment tout le temps tous occupés, donc je n'y passais pas forcément autant de temps que je l'aurais souhaité. Mais je n'avais pas à me plaindre non plus, et je prenais tellement de plaisir à jouer au squash que la décision de continuer n'a pas été difficile à prendre.

En observant ce qui se passe sur les tournois jeunes ou le circuit professionnel, on constate que les parents Égyptiens ont une grande importance dans la carrière de leurs enfants. Quelle est votre vision de leur rôle ?

Ali Farag : Les parents Égyptiens sont très enthousiastes, ils accompagnent toujours leurs enfants à l'entraînement. Ils voyagent avec eux, si nécéssaire. Le squash peut avoir un coût assez élevé, et ils les soutiennent en permanence, que ce soit financièrement, mais aussi psychologiquement, etc. Donc oui, on peut dire que les parents jouent un rôle considérable dans le squash Égyptien.

"Si les parents poussent leurs enfants de la bonne manière et dans la bonne direction, ça fonctionnera." Raneem El Welily

Raneem El Welily : Je pense que les parents en Égypte sont différents par rapport aux autres pays. Comme disait Ali, ils ne font pas que déposer leurs enfants au club, ils restent avec eux pendant la séance. Si je prends mon cas, j'allais à l'école, puis au squash et ma mère venait me chercher pour me ramener à la maison pour le déjeuner. Ensuite, elle m'emmenait à nouveau au club pour une deuxième séance, et enfin à une sorte de cours du soir qui m'aidait à mieux suivre l'école. Elle s'occupait donc des repas, des transports et sur les tournois elle était même mon médecin (rires) ! Ma mère était tout pour moi. Donc oui, les parents en Égypte jouent un rôle très important dans notre réussite. Il faut néanmoins être conscient que certains peuvent être la raison pour laquelle leurs enfants abandonnent le squash, car trop les pousser peut avoir l'effet inverse. Mais si vous le faites de la bonne manière, et dans la bonne direction, ça peut, et ça doit fonctionner. En grandissant en Égypte, on m'a appris que les plus jeunes devaient écouter les adultes, qui ont davantage d'expérience de la vie. J'écoutais donc tout ce que mon entraîneur me disait. Enfin, peut-être pas tout car j'étais têtue quand j'étais enfant, et je le suis encore ! Disons que j'essayais de l'écouter autant que possible, en sachant que lui - et les autres adultes – ne voulaient que mon bien. Je pense que le fait de respecter les personnes plus âgées et leur point de vue sur certains sujets de la vie repose davantage sur la culture que l'éducation.

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Pour Ali Farag et Raneem El Welily (ici en compagnie de sa mère, après sa victoire à l'US Open en 2018), les parents jouent un rôle essentiel dans le succès du squash Égyptien (Crédit photo : Raneem El Welily)

3 - LA FORCE DU NOMBRE

Le nombre de joueurs et joueuses professionnels qui s'entraînent en Égypte est plus élevé que n'importe où ailleurs. Selon vous, est-ce l'un des principaux facteurs qui expliquent la domination de votre pays ?

Ali Farag : Je crois en effet que la proximité – on habite tous dans un rayon de 80 kilomètres - joue un rôle important dans le succès du squash Égyptien. Non seulement on joue les uns contre les autres depuis notre plus jeune âge, mais on aussi eu la chance de côtoyer les générations précédentes. On a pu les observer au quotidien, et essayer de devenir comme eux. Je pense que cet aspect est fondamental.

"La proximité des joueurs joue effectivement un rôle important dans le succès du squash Égyptien." Ali Farag 

Raneem El Welily : Il y a tellement de joueurs en Égypte que l'émulation - à tous les niveaux et à travers toutes les tranches d'âge - nous a aidé à développer notre jeu et à progresser jour après jour. Je crois qu'on ne réalise pas bien la chance qu'on a, par rapport à d'autres pays. Si je prends l'exemple de Simon Rösner, il est basé en Allemagne et s'entraîne tous les jours avec Raphael Kandra et Nicolas Mueller. À part eux, il n'a personne avec qui jouer. En plus, lorsque vous voyez la même personne tous les jours, voire deux fois par jour, c'est difficile de trouver de nouveaux sujets de conversation. Alors qu'en Égypte, quand vous vous rendez dans un club vous croisez toujours des gens que vous n'avez pas vus depuis longtemps, et c'est l'occasion de prendre des nouvelles. Ce type d'environnement vous aide à rester sain d'esprit, si vous voyez ce que je veux dire …

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Raneem El Welily et Ali Farag (au premier rang, deuxième et troisième en partant de la gauche) en compagnie de leurs équipiers et du staff de leur club Wadi Degla (Crédit photo : Wadi Degla) 

Quels sont les joueurs avec lesquels vous vous entraînez au quotidien ?

Ali Farag : Toutes les semaines, je m'entraîne avec Tarek Momen, Mohamed Abouelghar, Omar Mosaad, Mazen Hesham, Karim Ali Fathi et Youssef Soliman. Il y a aussi Marwan El Shorbagy quand il est en Égypte - mais il est souvent en Angleterre – sans oublier les juniors évidemment. À n'en pas douter, avoir autant de partenaires d'entraînement différents nous aide beaucoup, et être confronté à des styles très divers permet de développer encore plus l'intelligence de jeu.

Raneem El Welily : Ça m'arrive de jouer avec d'autres filles, mais pas très souvent pour être honnête. En fait, je m'entraîne surtout avec des jeunes - des garçons -17 ans et parfois -19 - et c'est mon entraîneur Haitham Effat qui organise ces séances. Ce niveau est parfaitement adapté pour nous les joueuses, ils me poussent à m'entraîner dur jour après jour.

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En 1/8è de finale du  CIB Egyptian Open, Ali Farag a éliminé l'un de ses partenaires d'entraînement, Mazen Hesham (Crédit photo : Steve Cubbins)

Dès lors, comment expliquez-vous que quasiment aucun joueur professionnel ne vienne s'installer en Égypte afin de profiter de cet environnement ? 

Ali Farag : C'est une excellente question. Avec Nour (NDLR : El Tayeb, son épouse, n°3 mondiale), on se demande parfois pourquoi des joueurs d'autres pays ne viennent pas plus souvent en Égypte pour s'entraîner, car les conditions sont parfaites. Comme je le disais précédemment vous avez la possibilité de vous entraîner avec de nombreux joueurs, et les coaches sont de grande qualité. Le seul bémol, c'est qu'il y a peut-être un manque au niveau des kinés. Je suppose que l'Égypte est un pays totalement différent des autres, et que les principaux obstacles sont la culture et la langue. Peut-être les autres joueurs sont-ils sceptiques quant à leur capacité à s'intégrer ? Néanmoins, il y a quelques exemples : une famille Australienne a passé quelque temps ici, et il y a un Indien qui s'entraîne tous les jours au stade. Concernant les joueurs de haut niveau, le seul exemple est Sabrina Sobhy, qui vient de s'installer en Égypte. J'aimerais vraiment que d'autres suivent cette voie dans le futur.

"La culture est différente en Égypte, et ce n'est pas facile de venir habiter ici et de s'adapter." Raneem El Welily

Raneem El Welily : Au cours des dernières années, certains joueurs ont commencé à venir en Égypte pour s'entraîner, mais c'était plutôt de manière intensive sur une courte période et pas de façon permanente. Il existe quelques exemples de joueurs en provenance d'Inde, des États-Unis et d'Espagne, sans oublier certaines joueuses Canadiennes. Mais il faut comprendre que la culture en Égypte est différente de ce que vous trouvez ailleurs. Ce n'est pas facile de venir habiter ici et de se sentir à l'aise avec tous les aspects de la vie. Néanmoins, je pense que cette tendance pourrait se développer dans les années à venir, Sabrina Sobhy étant le premier exemple à ma connaissance (elle est en effet installée en Égypte depuis trois mois). C'était une décision facile pour elle – peut-être pas facile, mais disons plus facile qu'elle ne l'aurait été pour d'autres – car son père est Égyptien et connaît bien le pays. Peut-être que d'autres suivront. N'oubliez pas non plus qu'il y a des joueurs Égyptiens qui s'entraînent dans d'autres pays, je pense à Mohamed El Shorbagy ainsi que Amr Shabana et Ramy Ashour il y a quelques années quand ils étaient encore sur le circuit. Ça a peut-être donné l'impression que l'Égypte n'était pas le meilleur choix en matière de base d'entraînement. En ce qui me concerne, je suis persuadée qu'il n'y a pas un autre endroit au monde où je pourrais bénéficier d'un entraînement d'une telle qualité.

4 - L'ATTAQUE MAIS PAS QUE ...

Lors de la même conférence de presse, Camille Serme avait déclaré : « En Égypte, leur objectif est de gagner le point quelle que soit la manière, alors qu'en France on enseigne les outils qui doivent normalement permettre d'y parvenir. » Quel est votre avis ?

Ali Farag : Nous avons souvent cette discussion, mais en se comparant plutôt aux joueurs Anglais qu'aux Français. En Égypte, on nous dit “ok, je veux que tu mettes la balle à tel endroit et c'est comme ça que tu vas gagner le point,” plutôt que de nous expliquer comment on doit faire. Bien sûr, on travaille la technique. Mais on s'intéresse surtout à la tactique, et ensuite c'est au joueur de trouver comment faire. Je pense que ça donne encore plus d'esprit créatif aux joueurs Égyptiens, et c'est quelque chose de très important. 

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Raneem El Welily (ici face à Camille Serme lors de la finale du World Tour en juin dernier) estime que le squash Égyptien ne repose plus essentiellement sur l'attaque (Crédit photo : Steve Cubbins)

Raneem El Welily : Si Camille sous-entend que les joueurs Égyptiens sont davantage portés vers l'attaque que les autres, alors oui en effet notre école repose sur cet aspect du jeu. Mais prenez Mohamed El Shorbagy par exemple, ce n'est pas ce qu'on appelle un attaquant. En réalité, il a plusieurs types de jeu à sa panoplie, et généralement il ne se repose pas sur son jeu d'attaque – qui est néanmoins excellent … Je pense que ces dernières années, les joueurs Égyptiens ont élargi leur palette d'outils qui permettent de gagner des matches. En ce qui me concerne, plus j'avance dans ce sport et plus j'ai l'impression d'apprendre jour après jour aux côtés de mon entraîneur. On travaille sur tellement d'aspects au quotidien, et c'est quelqu'un de très inventif sur le court. Il m'aide à développer mes armes, à savoir comment gagner le point, à m'adapter à différents types de jeu etc. Il ne s'agit plus seulement de gagner le point pour nous, énormément d'autres choses rentrent en ligne de compte.

5 - L'ÉGYPTE, TROP SEULE ?

Récemment, Jonah Barrington disait dans une interview accordée à la PSA que selon lui, une domination trop importante de l'Égypte pourrait être un problème à terme car le squash a besoin de diversité. Étant de l'autre côté de la barrière, ressentez-vos les choses de la même façon ?

Ali Farag : J'ai vu cette interview, et je suis d'accord avec Jonah Barrington. Je suis évidemment fier que les Égyptiens soient aussi performants, mais ce n'est pas forcément bon pour notre sport. Ce serait mieux qu'il soit aussi divers que possible, et que de nombreux pays aient de bons résultats. Et d'ailleurs, même pour nous ce n'est pas une très bonne chose, pour une raison simple : certes, les gens qui connaissent le squash et savent à quel point il est difficile de gagner et gagner encore se rendent compte de l'ampleur de ce qu'on fait. En revanche, quand vous essayez d'attirer l'attention de personnes en dehors du squash et que vous leur dites, nous avons quatre joueurs dans le top 5 chez les hommes et chez femmes, ils pensent que l'Égypte est le seul pays à pratiquer ce sport et ont tendance à dévaloriser nos performances. C'est mieux si d'autres pays se distinguent, et personnellement je pense que Camille Serme par exemple fait de très belles choses. Toujours chez les femmes, il y a aussi Amanda Sobhy (États-Unis), Joelle King (Nouvelle-Zélande) et Sarah-Jane Perry (Angleterre), et côté masculin nous avons Diego Elias (Pérou), Paul Coll (Nouvelle-Zélande) et Simon Rösner (Allemagne). Les joueurs français sont également présents, notamment avec Grégoire Marche et Mathieu Castagnet qui est en train de revenir à son meilleur niveau. Vous avez aussi Victor Crouin, je n'ai aucun doute qu'il fera une très belle carrière une fois ses études terminées. En conclusion, oui j'aimerais qu'il y ait davantage de diversité, mais également que les joueurs Égyptiens continuent à dominer ... 

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Même si l'Égypte domine le squash actuellement, détenant notamment les deux titres mondiaux par équipe, Ali Farag et Raneem El Welily estiment que d'autres nations peuvent leur contester cette suprématie à court et moyen terme, à l'image de Paul Coll et des jeunes Malaisiennes (Crédits photo : PSA World Tour, Raneem El Welily, Steve Cubbins & WSF) 

"La nature est ainsi faite que lorsque vous arrivez en haut de quelque chose, vous devez forcément redescendre un jour." Raneem El Welily 

Raneem El Welily : Je peux comprendre le point de vue selon lequel le squash pourrait perdre de son intérêt si les Égyptiens continuent à gagner, mais il faut prendre du recul et observer l'histoire de ce sport. Il y a de nombreuses années le Pakistan a dominé, puis ça a été au tour de l'Australie, de l'Angleterre et maintenant l'Égypte. Au fil du temps, la suprématie est passée d'un pays à l'autre. En résumé, oui les joueurs Égyptiens sont très performants à l'heure actuelle, mais ça ne veut pas dire qu'ils resteront au sommet pour toujours. La nature est ainsi faite que lorsque vous arrivez en haut de quelque chose, vous devez forcément redescendre un jour. Peut-être pas tout en bas, mais au moins en partie et à ce moment là vous devez prendre du recul afin de réfléchir à comment changer les choses pour revenir au sommet. Oui, le squash Égyptien domine aujourd'hui, mais dans quelques années - je ne sais pas combien - ce ne sera peut-être plus le cas. De nombreux pays ont mis en place un processus de changement, de développement et d'amélioration. Je pense à l'Inde, à Hong Kong, à la Malaisie, aux États-Unis, et même à certains pays d'Amérique du Sud et à la France. On voit dans ces pays des juniors qui progressent de plus en plus, et c'est un signe que la suprématie pourrait changer de main dans un futur proche. Garder ceci à l'esprit permet d'avoir conscience que l'Égypte ne dominera pas éternellement, malheureusement ...

Avant ceux de Baptiste Masotti et Camille Serme demain, Ali Farag et Raneem El Welily disputent leur quart de finale devant les pyramides ce soir (respectivement face à Daryl Selby et Nour El Tayeb). Matches à suivre sur Eurosport Player à partir de 17h30. 

 Rendez-vous le mois prochain pour un nouvel épisode de "Le squash autrement" 

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