La mise au point d'un ancien numéro 1 mondial, un match marathon, des Anglaises qui se distinguent et une mise en scène de haut vol : retour sur cette belle soirée en quelques points.

Article de Jérôme Elhaïk

On l'avait laissé presque chancelant mercredi, alors qu'il s'en était sorti d'extrême justesse contre son compatriote Patrick Rooney. Mais hier soir, James Willstrop est rentré sur le court avec la ferme intention de montrer un autre visage, et Lucas Serme en a fait les frais. Comme à son habitude, le Français s'est battu jusqu'au bout, mais n'a jamais vraiment trouvé les solutions pour contrecarrer la précision du Marksman. Tête d'affiche de cette semaine Nantaise, Willstrop sera donc au rendez-vous des demi-finales, où il affrontera Zahed Salem (voir ci-dessous). « J'adore jouer en France, » disait-il après le match. « Le public a naturellement encouragé Lucas ce soir, mais il manifeste ses émotions sur chaque échange, ce qui est très appréciable pour les joueurs. En ce qui me concerne, le match compliqué que j'ai eu en 1/8è de finale m'a aidé, j'étais bien plus vif sur le court ce soir (hier). »

James Willstrop (à gauche) a fait honneur à son statut de tête de série numéro 1 face à Lucas Serme (Crédit photo : Mikphotos.fr) 

Le choc entre Zahed Salem et George Parker a tenu toutes ses promesses. Pendant plus d'une heure et demi, le public, composé en partie de profanes de la discipline, a eu un échantillon de ce que tout le squash peut offrir : des échanges interminables, de superbes coups gagnants, des défenses acharnées, quelques discussions animées avec l'arbitre allemand Ralf Harenberg, et des rebondissements. Mené 2 jeux à 0 par un Parker inspiré et ultra-déterminé, Salem a su revenir patiemment dans la partie, « en arrêtant de (se) focaliser sur les décisions d'arbitrage et en se concentrant sur le jeu. » Le cinquième jeu sera très indécis, mais l’Égyptien fait mal à son adversaire grâce à des amorties de revers très précises. Il l'emporte finalement après 95 minutes – soit le match le plus long de l'histoire du tournoi. Salem va maintenant pouvoir profiter de sa journée de repos avant d'affronter James Willstrop. Ce sera la première confrontation entre les deux joueurs.

Pendant 95 minutes, George Parker (en noir) et Zahed Salem se sont rendus coup pour coup (Crédits photo : Philippe Rochais)

Ceux d'entre vous qui suivent le squash de près ne découvrent pas son nom : il y a quelques semaines, Lucy Turmel était la seule représentante d'un autre pays que l’Égypte en demi-finales du championnat du monde junior, hommes et femmes confondus. La jeune Anglaise (18 ans) ne cesse de franchir des paliers, à l'image de son parcours à Nantes. Après avoir décroché la plus belle victoire de sa carrière à la Maison du Squash face à la Néerlandaise Milou van der Heijden (39ème mondiale) mercredi, elle a fait encore mieux hier soir. Si elle avoue avoir été un peu stressée à l'idée de monter sur la scène du théâtre Graslin, ça ne s'est pas vu sur le court, et elle a affiché une superbe maîtrise pour disposer de l’Égyptienne Nadine Shahin (30ème) en quatre jeux disputés. D'ores et déjà assurée d'effectuer un joli bond au prochain classement, Turmel n'aura rien à perdre samedi contre sa compatriote Emily Whitlock.

À seulement 18 ans, Lucy Turmel fait preuve d'une étonnante maturité (Crédit photo : Philippe Rochais)

Tête de série n°1 du tableau féminin, Emily Whitlock a eu toutes les peines du monde à se défaire de sa compatriote Julianne Courtice. Celle-ci se demande sans doute encore comment elle a pu laisser échapper le troisième jeu, alors qu'elle menait 8-1. Mais si elle a souffert sur le court, l'Anglaise s'est « fait un petite kif, » comme disent les jeunes (même si je suis sûr qu'ils ne disent plus ça depuis longtemps), après le match. Au micro du speaker Romain Suire, elle a demandé à DJ One Up de monter un peu le son et s'est amusé avec le public du théâtre Graslin, avant de courir chercher son téléphone pour immortaliser ce moment avec un petit selfie. « Ce n'était pas mon meilleur match aujourd'hui, notamment parce que Julianne a très bien joué. Mais quand vous avez la chance d'évoluer dans de telles conditions et dans une telle ambiance, vous n'avez qu'une envie c'est de revenir ! » Pour elle ce sera samedi, contre une autre Anglaise, Lucy Turmel.

Ici en pleine réflexion pendant son match, Emily Whitlock s'est lâchée une fois la partie terminée (Crédit photo : Mikphotos.fr) 

Même si les acteurs - en l'occurrence les joueurs - sont au centre du spectacle, l'open international de Nantes ne se résume pas à ce qui se passe dans le « cube de verre » pendant les matches. En amenant le squash à l'opéra, François Le Jort et son équipe atteignent plus que jamais leur objectif, à savoir transcender la rencontre entre sport et culture. Grâce un habillage artistique savamment mis au point, les deux mondes se retrouvent en harmonie : avant chaque session, la cantatrice Anne-Sophie Duprels et sa voix sublime interprètent la Wally d’Alfredo Catalani, accompagnée du Quatuor Liger, pendant que deux danseurs disputent un match imaginaire, passant en revue toute la panoplie des coups et des déplacements des joueurs de squash. Un spectacle étonnant, et qui sonne juste. 

La fabuleuse performance de la cantatrice Anne-Sophie Duprels est l'un des éléments qui font de cet open de Nantes bien plus qu'un évènement sportif (Crédit photo : Mikphotos.fr)