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VICTOR CROUIN : « LES TOURNOIS JEUNES SONT UNE ÉCOLE DE LA VIE » (1ère PARTIE)

Événements 24/05/2018

Dans quelques semaines (le 16 juin), Victor Crouin aura 19 ans et refermera définitivement livre de sa carrière en junior. Une période qu'il a achevée par un deuxième titre de champion d'Europe individuel, dernière ligne d'un palmarès qui le place à un niveau que seuls Grégory Gaultier et Camille Serme ont atteint dans le squash Français.

Selon Victor, c'est pendant ces années en junior qu'un joueur « développe et exploite son potentiel. Les tournois jeunes m'ont permis d'apprendre à me connaître, à dépasser mes limites, et à rebondir après une défaite. Des anecdotes ? Je pourrais quasiment tout raconter tellement c'est ancré dans ma mémoire... » Avant qu'il ne s'envole pour les États-Unis, où il va intégrer la prestigieuse université d'Harvard en septembre, on l'a pris au mot et on lui a demandé d'ouvrir sa boîte à souvenirs. Et si on commençait par le commencement ?

Article de Jérôme Elhaïk

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Victor Crouin photo une

(Crédits photo : SiteSquash, OFJ 2012, Victor Crouin, Salming Squash)

CHAPITRE 1 - LES DÉBUTS

 

 

Premiers pas

Victor découvre les sports de raquette avec le mini-tennis, à 4 ans. « Il a immédiatement montré des dispositions, avec une mise à distance presque naturelle par rapport à la balle, » raconte son père Emmanuel, personnage essentiel dans sa carrière (on y reviendra lors de la deuxième partie). Ils jouent ensemble au tennis mais deux ans plus tard, Victor rejoint également son papa au squash, la discipline de prédilection de ce dernier (il a atteint le top 100 français en 2009-2010). Pendant quelques années, il pratique les deux disciplines, et va rapidement disputer ses premiers tournois de squash au sein de la Ligue PACA.

"Dès ses débuts au mini-tennis, Victor a montré des dispositions." Emmanuel Crouin

 

Premiers tournois

Victor a 7 ans lorsqu'il participe à ses premiers tournois. Il va presque constamment croiser la route d'un certain Benjamin Aubert (qui sera quelques années plus tard son partenaire en équipe de France junior). Ce dernier - 1 an et demi plus âgé - a généralement le dessus, à l'exception de leur première rencontre (dont on n'a retrouvé aucune trace sur la toile, mais qui d'après leurs souvenirs communs a dû avoir lieu en 2006 ou 2007).

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 Victor Crouin (à droite) et Benjamin Aubert - ici en compagnie de Michèle Lecomte - se sont affrontés pendant toute leur jeunesse dans la Ligue PACA (Crédit photo : https://benjamin-aubert-squash.com)

« C'était lors d'un championnat de Ligue au Set Squash d'Aix, » se rappelle Victor. « J'avais gagné en cinq jeux ! Mais j'en ensuite perdu une dizaine de matches contre Benjamin, avant de le battre à nouveau, notamment au championnat de France -17 ans à Nîmes. »

 

 

Premiers championnats de France

Victor participe à son premier championnat de France individuel en 2008 à Rennes. « Je n'ai pas eu les débuts dont on puisse rêver. J'avais perdu 3-2 en 1/16è de finale contre Florent Auffret de la Ligue Rhône-Alpes. J'ai joué avec 40 de fièvre, je n'avais pas dormi la nuit précédente. » Ce qui ne l'empêchera pas de remporter les quatre matches suivants et de terminer 17ème. Douze mois plus tard, toujours à Rennes, il se hisse en demi-finale. « Je me souviens avoir pris un coup de raquette en quart de finale contre mon partenaire en équipe PACA, Alexandre Dubarry. J'ai toujours eu un peu peur de le jouer à cause de ses grosses frappes (rires). » Il est ensuite battu par Jules Cremoux qui sera, comme on vous le raconte un peu plus loin, l'une de ses bêtes noires. Mais il prend ensuite sa revanche contre Auffret dans le match pour la troisième place : se doute-t-il en montant sur le podium que cette médaille est la première d'une très longue série ?

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Victor Crouin (à droite), aux côtés de Guillaume Ducos et Jules Cremoux lors de son premier podium national en poussins (-11 ans) en 2009 à Rennes (Crédit photo : SiteSquash)

 

 

VICTOR CROUIN PAR ... BENJAMIN AUBERT : « IL ME FAISAIT DES SERVICES EN CLOCHE, JE TENTAIS DE LES REMETTRE COMME JE POUVAIS... »

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 Victor Crouin (à droite) et Benjamin Aubert, ici lors de leur confrontation la plus récente en finale d'un tournoi en Pologne il y a quelques jours (Crédit photo : Victor Crouin)

« Je me rappelle en effet de quelques matches, je pense qu'on s'est joués pas loin de quarante fois. Il avait gagné le premier, je devais avoir 8 ans et demi et lui à peine 7 ans. C'était au Set Aix en demi-finale d'un championnat de ligue si je me souviens bien, il me faisait des services en cloche, et moi du haut de mon mètre douze, je tentais de les remettre comme je pouvais … Il avait gagné en 5 jeux, et j'avais beaucoup pleuré (rires) ! Ensuite, on s'est affrontés pendant 3 ou 4 ans sur chaque finale du Karakal Tour, et les pleurs ont changé de camp. Pas toujours, mais très souvent. Je lui souhaite bonne chance pour la suite à Harvard. » 

 

CHAPITRE 2 - CHAMPIONNATS DE FRANCE : QUAND VICTOR RIME AVEC VICTOIRE

 

 

Premier titre en 2010 ...

« J'avais disputé deux championnats de France avant celui de 2010 à Rennes, et j'avais donc déjà acquis une certaine expérience. » Victor Crouin ne laisse aucune chance à ses adversaires, Hugo Mandil étant le seul à lui donner un peu de fil à retordre en finale. « L'image qui me reste vraiment en tête, ce sont les gradins du court central du club de l'Hermine, qui me paraissaient gigantesques. Ce titre est bien sûr spécial car c'est le premier, mais tous les autres m'ont procuré de la fierté et du bonheur, car ce n'est pas facile d'arriver en forme le jour J et de gagner avec le statut de favori sur les épaules. » Le Toulonnais remporte ce premier titre national sans perdre un jeu, ce qui va devenir une habitude. 

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Un an après sa troisième place, Victor remporte son premier titre de champion de France en -11 ans en 2010 à Rennes (Crédit photo : Serge Parbaud) 

« Je me suis toujours fixé comme objectif de perdre le moins de points possible. Je me souviens qu'en -15 ans à Royan (NDLR : en 2013), je n'en ai perdu qu'un seul point avant les demi-finales, et cette année en -19 ans, je voulais gagner un jeu 11-0 à tous les matches. Ça peut être motivant de se fixer ce genre d'objectifs, qui sortent de l'ordinaire. » Cette victoire va également agir comme un déclic. « C'est à ce moment là que j'ai décidé d'arrêter le tennis et de me consacrer uniquement au squash, notamment car c’est un sport plus ludique. » 

 

… et six autres suivront !

Victor est l'un des quatre joueurs Français à avoir été champion de France dans les cinq catégories de jeunes (avec Grégory Gaultier, Grégoire Marche et Auguste Dussourd), et il n'a pas jamais perdu un match contre un joueur né la même année que lui. Il réalise même le doublé en -17 ans et en -19 ans, ces quatre titres ayant été obtenus sans perdre le moindre jeu … « Je dois dire que certaines années, j'étais davantage motivé pour performer dans la catégorie supérieure, et qu'il y a des médailles, même si elles n'étaient pas en or, qui m'ont rendu encore plus heureux. Je pense en particulier au bronze en -17 ans à Nîmes, alors que je n'avais que 14 ans. J'avais battu Benjamin Aubert en 5 jeux en quart de finale, puis j'avais décroché la troisième place contre Jules Cremoux. Cette victoire signifiait beaucoup pour moi car c'était ma première contre lui ! »

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 Au-delà de ses nombreux titres dans sa catégorie, Victor a également brillé en se frottant à des joueurs plus âgés, comme par exemple en -17 ans en 2014 (en haut, contre Jules Cremoux (Crédits photo : Victor Crouin) 

 

Les (rares) défaites

« Savoir rebondir après une défaite. » C'est l'une des choses essentielles que Victor Crouin a apprises lors de son parcours en jeunes. Elles ont été très peu nombreuses en championnat de France, mais il y en a tout de même eu quelques unes marquantes, notamment contre Jules Cremoux. « Quand j'étais petit, Benjamin Aubert était ma bête noire mais il était plus âgé, alors que Jules était le seul qui m'empechait de faire le doublé dans ma catégorie. » Un an plus âgé que Crouin, le joueur de Casseneuil le bat en demi-finale en -11 ans en 2009, puis deux fois en finale : en -13 ans en 2011, puis en -15 ans en 2013. « Il avait un jeu puissant et physique, autant dire tout ce qui me dérangeait quand j'étais plus jeune. Mais au fil du temps, je suis parvenu à contrer son jeu à l'aide d'autres armes. Avec le recul, être moins puissant que certains de mes adversaires a été une chance : j'ai dû me construire autrement, en utilisant toute la surface du mur frontal et en étant plus intelligent. » Quelles sont les autres défaites qui l'ont marqué ? « Il y a celle contre Enzo (Corigliano) en finale des -19 ans en 2015 à RoyanJ'étais déçu, car je savais alors que je ne pourrai pas égaler le record du nombre de trois titres dans cette catégorie détenu par Grégoire MarcheMais cette défaite m'a beaucoup servi, d'ailleurs si je ne me trompe pas c'est la dernière fois que j'ai perdu contre lui. Dans un passé plus lointain, je pense au championnat de France -15 ans en 2012 à Chartres, alors que j'étais -13 deuxième année. J'avais perdu en 1/8è de finale face à Rohan Mandil, un autre joueur qui m'a causé de nombreux problèmes quand j'étais plus jeune car il était tres puissant. » 

"Être moins puissant que mes adversaires a été une chance."

 

 

VICTOR CROUIN PAR ... JULES CREMOUX : « CE QUI M'IMPRESSIONNAIT LE PLUS ? SON PROFESSIONNALISME »

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 Victor Crouin (à gauche) en compagnie de celui qui a été sa bête noire entre 2009 et 2014, Jules Cremoux (Crédit photo : Victor Crouin)

« Je me souviens que Victor est monté en puissance année après année. Il a toujours été un joueur assez mûr pour son âge : il se comportait déjà comme un joueur d’expérience, avec des objectifs, des routines d’échauffement et de préparation mentale qu’il travaillait certainement avec son père, et une tactique de jeu déjà définie avant le début d'un tournoi. Ce qui m'impressionnait le plus chez lui, c’était son professionnalisme, et je pense que ça fera la différence à long terme par rapport à ses homologues Français. Il n'était pas le plus grand, le plus rapide ou le plus technique, mais il savait ce qu’il avait à faire, et surtout comment le faire de la manière la plus efficace possible : les plus grands champions ont souvent cette dimension mentale supérieure par rapport à leurs adversaires, c'est essentiel au très haut niveau. Je me rappelle que toutes nos rencontres étaient de gros combats, on savait qu'aucune n'était gagnée d’avance. Le souvenir qui me vient naturellement, c'est la finale du championnat de France -15 ans, à Royan je crois. J'avais gagné 3-2, mais c’était la première fois qu’il me bousculait autant. Il n'était pas trop déçu de sa défaite, au contraire il en tira une certaine gloire (sic) sur le moment. Ça m’avait surpris, mais c’est vraiment cette faculté à ne pas abandonner, et à tirer des enseignements même de ses défaites pour se fixer de nouveaux objectifs qui me fascine chez lui : si je ne me trompe pas, c'est la dernière fois que j'ai remporté un championnat de France, et la dernière fois que j'ai battu Victor. » 

 

VICTOR CROUIN ... EN CHIFFRES

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 Victor Crouin, sur la plus haute marche du podium lors de cinq de ses sept titres de champions de France en jeunes (Crédits photo : Nicolas Barbeau, Jean-Luc Paquemar, Squash Chartres, Victor Crouin) 

Au total, Victor Crouin a disputé une petite vingtaine de championnats de France individuels, dont 10 dans sa catégorie d'âge. Son bilan y est le suivant : 7 médailles d'or, 2 médailles d'argent et 1 médaille de bronze (c'est-à-dire trois défaites en 50 matches, toutes infligées par Jules Cremoux). À signaler que ses sept titres ont été obtenus sans perdre le moindre jeu ... On peut y ajouter une médaille d'argent et deux médailles de bronze dans les catégories supérieures.

 

 

CHAPITRE 3 - À LA CONQUÊTE DE L'EUROPE …

 

 

Premiers voyages à l'étranger ... 

Avant même d'être le patron dans l'hexagone, Crouin a cherché à se mesurer à ses homologues étrangers. Il a 9 ans lorsqu'il dispute son premier tournoi européen en Belgique, dans la catégorie -13 ans (en novembre 2008). « Sous la houlette de Fred Lecomte, » précise-t-il. « Lui et sa femme Michèle ont souvent fait office de deuxième famille pour moi. Entre les rassemblements nationaux et régionaux, et les tournois européens, je logeais souvent chez eux. » Victor ne manque d'ailleurs jamais de rappeler l'importance de cette grande dame du squash français (malheureusement disparue en 2011). « Elle m'a beaucoup aidé. Elle a consacré énormément de temps à l'open de France junior, et j’ai toujours eu une pensée pour elle lorsque j'y ai participé. »  

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Pour Victor, Michèle et Fred Lecomte (ici à ses côtés lors du tournoi des 5 Nations 2013) ont fait office de « deuxième famille. » (Crédit photo : Sylvain Zyssman) 

En Belgique, Victor est beaucoup plus jeune que ses adversaires : si ce n'est un par forfait, il ne remporte aucun match, ce qui ne lui arrivera plus jamais par la suite. « Mais je n'en garde aucun souvenir traumatisant, » raconte-t-il. « Je me rappelle plutôt du grand nombre de joueurs, de la logistique pas toujours facile à gérer à cet âge (les navettes, les horaires de match, le numéro du court etc.), et d'une envie d'apprendre en regardant le plus grand nombre de matches possible, que ce soit dans ma catégorie mais aussi chez les plus grands. L'un des challenges auxquels j'ai été confronté, c'est de garder ma rigueur habituelle (me coucher tôt, manger équilibré, etc.) tout en essayant de me faire accepter, et même aimer au sein de la délégation française. Ça n'est pas toujours facile car il peut y avoir de la concurrence et de la jalousie entre les jeunes. »

"L'envie d'apprendre, en regardant le plus grand nombre de matches possible."  

Premiers podiums … 

Au niveau international, les choses sérieuses commencent pour le jeune Crouin en 2011. Il est finaliste de l'open de France junior, battu par un certain Jules Cremoux … Il termine également deuxième en Allemagne et en Belgique. Avant de remporter son premier titre en Suisse contre l'anglais Kyle Finch, l'un de ses grands rivaux avec l'Allemand Konstantin Black, et surtout au Belge John Atyeo (« Il faisait partie de mes bêtes noires, et nos matches se disputaient souvent en cinq jeux. Il avait un tempérament assez colérique, et du coup c'était assez animé sur le court. Mais c'était surtout un super joueur, et un très bon ami. On a gardé contact, et je sais qu'il joue au hockey sur glace à un bon niveau. ») Il se souvient particulièrement de ce premier titre en Suisse « car c'était la première fois que je jouais la finale sur un court vitré, et j'étais donc encore plus fier de cette victoire. » Parmi ses douze victoires sur le circuit européen, cinq ont d'ailleurs été obtenus au Swiss Junior Open (auxquels on peut ajouter une finale en -13 ans en 2012, encore face à Cremoux). « Chaque année, je me disais, "ce tournoi te réussit bien, tu vas faire un bon résultat" et cela s'est souvent passé comme je le souhaitais ! » Notamment en 2015 : quelques semaines après sa défaite en finale du championnat de France contre Enzo Corigliano, il prend deux fois sa revanche et réalise le doublé Belgique-Suisse. À seulement 16 ans, il remporte ses premiers titres européens en -19 ans.

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 Victor a très souvent brillé à l'open de Suisse, à l'image de sa victoire en -19 ans en 2015 face à Enzo Corigliano (à sa gauche) (Crédit photo : Pierre-André Loaëc) 

 

 

Le British, so special ...

Vous le savez certainement : début janvier, Victor Crouin a atteint la finale du British Junior Open pour sa dernière participation, s'inclinant contre Marwan Tarek (qu'il retrouvera dans quelques semaines à Harvard). Mais le Toulonnais a toujours eu un rapport très particulier avec ce tournoi, qui est la Mecque du squash pour les jeunes du monde entier. « En effet, ça a toujours été un tournoi spécial à mes yeux. J'ai même arrêté d'aller au ski, qui est l'une de mes passions, pour me consacrer à la préparation pour le BJO. Jusqu'à cette année, je n'avais jamais dépassé le stade des quarts, mais à chaque fois j'étais dans les gradins dès 10 heures du matin le dimanche pour regarder toutes les finales, en rêvant d'y participer un jour ! Et ensuite, je repartais à l'entraînement avec encore plus de motivation en vue de l'édition suivante. » Victor a 11 ans lorsqu'il y effectue ses premiers pas en -13 ans, en janvier 2011. Il est sèchement éliminé par l'Égyptien Mostafa Abouelmakarim en 1/8è de finale, alors que le tournoi est remporté par le futur champion du monde, le Malaisien Eain Yow Ng. « C'est souvent un Égyptien qui m'a barré la route. J'étais tétanisé lorsque je les jouais, mais j'ai appris à faire un peu mieux chaque année. C'est aussi pour ça que l'ambiance est différente au British : il n'y a pas que des européens, mais aussi et surtout une armée de joueurs Égyptiens, prêts à tout pour sortir vainqueur de leur match (rires). »

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British Junior Open 2012 : six ans avant leurs retrouvailles en finale en -19 ans, Victor avait été battu par Marwan Tarek à Sheffield (Crédit photo : SquashSite

L'année suivante, il est opposé au même stade de la compétition à Marwan Tarek. « Je ne le connaissais pas du tout, et je me suis beaucoup de pression car je n'avais jamais perdu contre un joueur plus jeune que moi. C'est pourtant ce qui s'est produit, à cause de cette pression mais aussi du combat physique qu'il m'avait imposé. Selon moi, Marwan a toujours été plus professionnel que tous les autres Égyptiens. C'est peut-être la raison pour laquelle il a été accepté à Harvard, même si dans son comportement il reste tout de même 'tête en l'air'. » Crouin va ensuite échouer trois fois en quart de finale, dont deux fois contre un autre Égyptien, Mostafa Montaser, qui l'avait également battu en finale de l'Open de France en 2012. « Je me souviens qu'il m'avait offert un papyrus après le match. Je ne pense pas que c'était un vrai, mais c'était un beau cadeau de sa part. Il a été bon en junior, et a même été en finale du British en -15 et en -17. Mais il a eu pas mal de blessures, qui l'ont écarté des courts pendant de longues périodes. »

 

 

VICTOR CROUIN PAR ... JOHN ATYEO : « JE GARDE DE GRANDS SOUVENIRS DE MES MATCHES CONTRE LUI »

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 Victor Crouin (à gauche) en compagnie de Jules Cremoux et du Belge John Atyeo sur le podium de l'open de France junior en -13 ans en 2011 (Crédit photo : Victor Crouin)

« Je continue à suivre les résultats de Victor sur sa page Facebook (qui est très bien faite d’ailleurs). On a eu beaucoup de rencontres très disputées, et j'en garde de grands souvenirs, particulièrement ma victoire en finale de l'open d'Allemagne. Le match avait été intense de bout en bout avec un final à suspense, et il avait eu plusieurs balles de match dans le cinquième jeu ! Victor était exemplaire (et l’est certainement encore) sur le court et toujours de bonne humeur en dehors. Avant d'être un adversaire, c'était un ami. J’espère que sa carrière dans le squash va continuer dans cette voie. J'en profite pour le saluer et lui transmettre mes encouragements ! » 

 

VICTOR CROUIN ... EN CHIFFRES

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 Un peu plus de six ans se sont écoulés entre la première et la dernière victoire de Victor Crouin sur un tournoi jeunes européen (Crédits photo : SquashSite, Christian Lortat) 

Entre novembre 2008 et février 2018, Victor Crouin a participé à une quarantaine de tournois européens, dont huit British Open. Son bilan est le suivant : 12 médailles d'or, 6 médailles d'argent, et 4 médailles de bronze.

 

 

CHAPITRE 4 - POUR L'HISTOIRE

 

 

Champion d'Europe ! 

Même s'il a eu de bons résultats dans les autres catégories, Victor Crouin est passé à la vitesse supérieure en -19 ans. Ça commence en avril 2017, lorsque le Toulonnais bat Kyle Finch en finale du championnat d'Europe. Il rejoint ainsi Grégory Gaultier mais aussi Grégoire Marche et Lucas Serme au palmarès, et met fin à six ans d'hégémonie Anglaise. « C'était un bonheur simple mais dont je garderais longtemps le souvenir dans ma tête. Les joueurs Français qui ont remporté ce titre ont tous atteint le top niveau mondial par la suite, il signifie donc beaucoup pour moi et je le classe sans hésitation parmi mes meilleurs souvenirs dans le squash. » 

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Son premier titre de champion d'Europe junior, un « bonheur simple » pour Victor Crouin (Crédit photo : K Photo)

 

 

Si proche de l'exploit … 

Quelques mois plus tard, Victor a l'occasion de marquer un peu plus l'histoire en devenant le premier Tricolore champion du monde, en Nouvelle-Zélande, mais il s'incline en finale, en 5 jeux contre Marwan Tarek.

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 Malgré sa défaite en finale, Victor Crouin a fait vibrer la France du squash avec son parcours au championnat du monde en Nouvelle-Zélande (Crédits photo : WSF World Juniors

« Ça reste un grand souvenir. C'était mon premier tournoi hors d'Europe – même si depuis je me suis bien rattrapé - et c'était un superbe événement, à la hauteur d'un tournoi World Series en termes d'organisation. On a aussi passé des moments magnifiques avec l'équipe de France féminine, Yann (Ménégaux) et Christophe (le kiné). Concernant la défaite en finale, je dois avouer que jusqu'au British Junior Open en janvier, je ressentais un petit goût d'inachevé. J'ai refait ce match plus d'une fois dans ma tête avant de me coucher, et ça m'arrive encore d'y penser. Mais être vice-champion du monde reste une belle reconnaissance, et ça traduit ma capacité à être présent aux bons moment dans la saison. Je dis jusqu'au British, car j'étais focalisé sur le fait d'avoir ma revanche contre Marwan et de remporter ce tournoi. Cependant, ça ne s'est pas passé comme ça, peut-être trop à cause de cette trop grosse envie (NDLR : il s'est incliné 3 jeux à 0). Mais après avoir joué pour la 5ème ou la 9ème place lors des sept éditions précédentes, je ne peux être que fier de cette deuxième place. » 

"Être vice-champion du monde reste une belle reconnaissance."  

 

Une fin heureuse

Crouin a bouclé la boucle au championnat d'Europe, fin mars 2018 en Pologne. Archi-dominateur jusqu'à la finale, il voit le Tchèque Viktor Byrtus remonter un handicap de deux jeux, avant d'avoir le dernier mot. « Il m'a poussé dans mes retranchements et j'ai dû utiliser toute mon expérience pour l'emporter. Conserver mon titre était l'un de mes objectifs cette saison, et je suis fier de l'avoir atteint car le statut de favori n'est jamais facile à porter. » Grâce à ce succès, il devient le deuxième joueur à conserver le titre européen junior, après Grégory Gaultier en 2000 et 2001. 

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Mission accomplie pour Crouin, qui est devenu il y a quelques semaines le deuxième double champion d'Europe junior, après Grégory Gaultier (Crédit photo : European Squash Champs - U19 2018) 

Victor Crouin s'est construit un palmarès individuel en junior qui le place quasiment sur un pied d'égalité avec son aîné et Camille Serme dans le squash Français (ils ont également remporté deux fois le championnat d'Europe et ont été vice-champion du monde, la seule différence étant leur victoire au British Open). Regarde-t-il ses temps de passage par rapport à celui que l'on surnomme le French General ? « Oui, car c'est un moyen de se motiver pour aller toujours plus haut. Mais c'est difficile de faire mieux tant Greg a été précoce, et il faut prendre en considération que les époques sont différentes. »

 

VICTOR CROUIN PAR ... VICTOR CROUIN : « LES TOURNOIS JEUNES, UNE ÉCOLE DE LA VIE »

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 Les voyages et la vie en groupe font partie des choses que Victor estime avoir apprises au cours de sa carrière en junior (Crédits photo : Victor Crouin)

« Les tournois jeunes sont une vraie chance pour un athlète sur le plan sportif, mais pas seulement : Ils m'ont permis de mieux me connaître et d'apprendre à repousser mes limites, et m'ont donc fait grandir en tant que personne. Comme je le disais précédemment, ça n'a pas toujours été facile de me faire accepter au sein de la délégation Tricolore. J'ai parfois eu des tensions avec certains joueurs, qui ont fini par devenir mes meilleurs amis avec le temps ! C'est marrant, parce que je suis perçu comme quelqu'un de très rigoureux, mais au cours de cette période, j'ai dû perdre une dizaine de téléphones portables, ainsi que d'innombrables blousons et vêtements divers, gourdes, lunettes de protection etc. Je me rappelle même être passé tout près d'oublier mon sac à dos dans un train. En revanche, je n'ai jamais perdu de raquette (rires). Tout ça pour dire que ça m'a permis d'apprendre à voyager, et à vivre en communauté. Et par la suite, de créer des liens avec des jeunes d'autres pays en communiquant en anglais, une langue que je maîtrise maintenant suffisamment pour partir vivre aux États-Unis. Parler d'une école de la vie est tout à fait juste, et peut-être que certains ne mesurent pas la chance que nous avons de vivre ça. »

Ne manquez pas la deuxième partie de notre rétrospective consacrée à la carrière en junior de Victor Crouin, à paraître en milieu de semaine prochaine. On y parlera d'équipe de France jeunes, de son avenir, et des ingrédients de la réussite.

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